Peut-on servir de l’alcool dans un restaurant sans licence 4 ?
C’est une question que se posent de nombreux restaurateurs, surtout lors d’une création ou d’une reprise d’établissement.
En réalité, tout dépend du moment où l’alcool est servi et du type de boissons proposées.
La loi fait une distinction claire entre les licences de restauration (qui permettent la vente d’alcool uniquement à table et pendant le repas) et la licence 4, réservée aux établissements souhaitant servir ou vendre des boissons alcoolisées en dehors des repas.
Cette distinction découle du Code de la santé publique, notamment de ses articles L3331-1 et suivants, qui encadrent strictement la vente d’alcools à consommer sur place.
L’objectif du législateur est double : prévenir les risques liés à la consommation d’alcool et différencier les activités de restauration de celles des débits de boissons purs (bars, brasseries, clubs, etc.).
Dans cet article, nous faisons le point sur :
- les différentes licences possibles pour un restaurant ;
- les cas précis où une licence 4 est obligatoire ;
- les risques encourus en cas d’exploitation sans licence adaptée ;
- et la procédure à suivre pour obtenir ou régulariser une licence 4.
Pour aller plus loin :
Les licences possibles pour un restaurant
Avant d’ouvrir un restaurant, il est essentiel de comprendre que toute vente d’alcool est soumise à une licence.
Mais il existe plusieurs types de licences, selon le type de boissons servies et le moment de la consommation.
L’objectif de cette distinction est d’éviter que des restaurants ne deviennent de fait des bars déguisés, tout en permettant à la restauration traditionnelle de servir du vin, de la bière ou des apéritifs pendant les repas.
Conformément à l’article L3331-1 du Code de la santé publique, trois situations peuvent se présenter :
une licence restaurant simple, une petite licence restaurant, ou une licence 4 lorsque le restaurant sert des alcools forts ou en dehors des repas.
Licence restaurant simple
La licence restaurant, parfois appelée licence grande restauration, autorise la vente de toutes les boissons alcoolisées — y compris les alcools forts — uniquement pendant les repas et à l’occasion de ceux-ci.
Autrement dit, l’alcool ne peut être consommé qu’à table, dans le cadre d’un service de restauration complet (entrée, plat, dessert).
Cette licence est la plus courante : elle suffit à la quasi-totalité des restaurants traditionnels, pizzerias ou bistrots qui servent de l’alcool uniquement à leurs clients attablés.
💡 Exemple concret : un restaurant italien servant du vin et du limoncello à table pendant le repas n’a besoin que d’une licence restaurant, même si des alcools forts sont proposés.
Cette autorisation doit être déclarée en mairie au moins 15 jours avant l’ouverture de l’établissement (formulaire Cerfa n°11542*05).
Source officielle : Service-Public.fr – Licence restaurant.
Petite licence restaurant
La petite licence restaurant autorise uniquement la vente de boissons fermentées non distillées appartenant aux groupes 2 et 3 définis par le Code de la santé publique.
Cela inclut :
- le vin,
- la bière,
- le cidre,
- le poiré,
- ou encore les crèmes de fruits titrant moins de 18° d’alcool.
Cette licence est donc suffisante pour les restaurants qui ne servent pas de spiritueux (apéritifs ou digestifs à base d’alcool fort).
💡 Exemple concret : une crêperie qui propose uniquement du cidre et du vin pendant les repas peut se contenter d’une petite licence restaurant.
Comme pour la licence complète, une déclaration préalable en mairie est obligatoire avant toute ouverture ou reprise.
Licence 4 dans un restaurant
Un restaurant doit détenir une licence 4 lorsqu’il souhaite servir ou vendre des alcools forts (vodka, rhum, whisky, liqueurs, etc.) ou proposer des consommations alcoolisées en dehors des repas.
Dans ce cas, l’établissement devient à la fois restaurant et débit de boissons à consommer sur place.
Il doit donc respecter la réglementation spécifique aux licences de plein exercice : formation au permis d’exploitation, déclaration en mairie et respect des quotas communaux (1 licence 4 pour 450 habitants).
Cette configuration concerne par exemple :
- les restaurants à ambiance musicale ;
- les bars-restaurants ouverts tard le soir ;
- les restaurants servant des apéritifs ou digestifs hors service.
💡 Exemple concret : un restaurant qui sert des cocktails au bar avant le repas ou un digestif après la fermeture de la salle de restauration doit obligatoirement détenir une licence 4.
👉 Pour comprendre le coût et les démarches d’obtention :
Dans quels cas une licence 4 est obligatoire ?
La licence 4 n’est pas systématiquement exigée pour tous les restaurants, mais elle devient indispensable dès que l’activité dépasse le simple cadre de la restauration.
L’idée est simple : dès qu’un établissement agit comme un débit de boissons, la licence 4 s’impose.
Deux grands critères à retenir
1. Le type de boissons vendues
Le Code de la santé publique (articles L3331-1 et suivants) distingue plusieurs catégories de boissons selon leur degré d’alcool.
La licence 4 est obligatoire pour vendre celles des groupes 4 et 5, à savoir :
- les alcools distillés (vodka, whisky, gin, rhum, tequila…) ;
- les apéritifs anisés ou liqueurs à plus de 18° d’alcool ;
- les cocktails contenant ces alcools.
💡 Exemple concret : un restaurant servant du vin, de la bière et des digestifs à base de rhum ou de whisky doit disposer d’une licence 4, même si l’alcool est servi pendant le repas.
2. Le moment de la consommation
Le second critère est celui du moment où les boissons sont servies.
Si le restaurant sert ou autorise la consommation d’alcool en dehors des repas, il entre dans le champ des débits de boissons et doit donc posséder une licence 4.
💡 Exemples pratiques :
- un bar-restaurant qui propose des apéritifs avant le service du soir ;
- un restaurant à ambiance musicale où les clients continuent à consommer des cocktails après avoir dîné ;
- un hôtel-restaurant dont le bar reste ouvert à la clientèle extérieure.
Dans ces situations, la licence 4 est obligatoire, même si le restaurant détient déjà une licence restaurant.
Et dans les autres cas ?
Si l’alcool est uniquement servi à table et pendant les repas, la licence restaurant (simple ou petite) suffit.
C’est le cas de la plupart des établissements de restauration traditionnelle, pizzerias, crêperies, ou traiteurs disposant d’un espace repas.
💡 En résumé :
| Situation | Licence requise |
|---|---|
| Vente de vin et bière uniquement pendant les repas | Petite licence restaurant |
| Vente de tous types d’alcools, mais uniquement pendant les repas | Licence restaurant |
| Vente d’alcools forts ou consommation hors repas | Licence 4 |
Pour en savoir plus sur les coûts et les démarches :
Que risque un restaurant sans licence adaptée ?
Exploiter un restaurant sans la licence adéquate, ou avec une licence incomplète, constitue une infraction au Code de la santé publique.
Cette situation expose l’exploitant à des sanctions administratives, financières et pénales, mais aussi à des conséquences assurantielles en cas d’incident.
Les sanctions prévues par la loi
L’article L3351-5 du Code de la santé publique prévoit que l’exploitation d’un débit de boissons sans la licence requise est punie de :
- 7 500 € d’amende,
- la fermeture administrative immédiate de l’établissement,
- et, en cas de récidive, la fermeture définitive prononcée par le préfet.
Ces sanctions s’appliquent aussi lorsque la licence affichée ne correspond pas à l’activité réelle (par exemple, un restaurant qui fonctionne en pratique comme un bar sans détenir de licence 4).
💡 Exemple concret : un restaurant qui vend des cocktails et digestifs au comptoir après le service, sans licence 4, risque la fermeture immédiate décidée par le maire ou le préfet, assortie d’une amende et d’un signalement au procureur.
Responsabilité du gérant
Au-delà de la sanction financière, le gérant de l’établissement engage sa responsabilité personnelle.
En cas d’infraction répétée, il peut faire l’objet d’une interdiction d’exploiter un débit de boissons pour une durée pouvant aller jusqu’à 5 ans (article L3332-15 CSP).
De plus, les compagnies d’assurance peuvent refuser toute indemnisation en cas d’accident, d’intoxication ou d’incident survenu dans un établissement non conforme.
💡 Exemple concret : si un client se blesse dans un bar-restaurant non déclaré comme débit de boissons, l’assurance responsabilité civile peut refuser la prise en charge, au motif d’activité non autorisée.
Conséquences commerciales
Outre le risque légal, l’absence de licence adaptée peut également bloquer :
- la revente du fonds de commerce, car un acquéreur exigera une licence en règle ;
- ou le transfert de la licence, qui suppose qu’elle ait été régulièrement exploitée.
👉 Pour comprendre comment régulariser ou transférer une licence, consultez :
Comment obtenir sa licence 4 pour un restaurant ?
Lorsqu’un restaurant doit détenir une licence 4, la procédure est identique à celle applicable à tout débit de boissons à consommer sur place.
Elle comporte trois étapes principales : formation, déclaration, et vérification de la disponibilité d’une licence dans la commune.
1. Suivre la formation au permis d’exploitation
Avant toute démarche, le futur exploitant doit suivre une formation obligatoire de 20 heures appelée permis d’exploitation.
Cette formation, prévue par l’article L3332-1-1 du Code de la santé publique, vise à sensibiliser les gérants aux obligations liées à la vente d’alcool :
- prévention de l’alcoolisme et protection des mineurs,
- lutte contre les nuisances sonores et troubles de voisinage,
- responsabilité civile et pénale du gérant.
Le permis d’exploitation est délivré par un organisme agréé par le ministère de l’Intérieur, et reste valable 10 ans (renouvellement possible par une session de mise à jour de 6 heures).
💡 Exemple concret : un restaurateur qui reprend un établissement fermé depuis plus de 3 ans doit suivre cette formation avant de pouvoir redéclarer l’ouverture.
👉 Source : Service-Public.fr – Permis d’exploitation
👉 À lire aussi : Obtenir licence 4
2. Déclarer l’ouverture du débit de boissons
Une fois le permis obtenu, il faut déclarer l’ouverture ou la reprise du restaurant auprès de la mairie du lieu d’exploitation, au moins 15 jours avant l’ouverture (article L3332-3 CSP).
La déclaration s’effectue à l’aide du formulaire Cerfa n°11542*05, et donne lieu à la délivrance d’un récépissé prouvant l’existence légale de la licence.
La mairie vérifie :
- que le quota communal n’est pas déjà atteint (1 licence IV pour 450 habitants),
- que l’exploitant respecte les conditions d’âge, de nationalité et d’honorabilité,
- et que le local est conforme à l’usage prévu (ERP, accessibilité, sécurité).
💡 Bon à savoir : la déclaration est gratuite, mais certaines communes demandent un justificatif du permis d’exploitation et des pièces d’identité du gérant.
👉 Source officielle : Service-Public.fr – Déclaration d’ouverture de débit de boissons
3. Vérifier la disponibilité ou recourir à une mutation/transfert
La création d’une nouvelle licence 4 est impossible dans une commune où le quota légal est déjà atteint.
Dans ce cas, deux solutions existent :
- Mutation : rachat d’une licence 4 existante dans la même commune, avec changement de titulaire.
- Transfert : déplacement d’une licence 4 depuis une autre commune du même département, avec autorisation préfectorale.
Ces opérations sont très encadrées, mais elles permettent d’obtenir une licence dans une ville “fermée à la création”.
💡 Exemple concret : un restaurateur à Bordeaux souhaitant ouvrir un bar à cocktails peut transférer une licence depuis une commune rurale voisine où elle est inutilisée.
👉 Pour connaître les coûts et démarches :
À retenir
| Étape | Objectif | Délai moyen |
|---|---|---|
| Formation (permis d’exploitation) | Obtenir l’attestation obligatoire | Environ 3 jours |
| Déclaration en mairie | Enregistrer la licence 4 | 15 jours avant ouverture |
| Mutation ou transfert | Obtenir une licence existante | 1 à 3 mois selon la préfecture |
👉 En résumé :
Pour qu’un restaurant puisse servir de l’alcool en dehors des repas ou proposer des alcools forts, il doit impérativement détenir une licence 4, obtenue après formation, déclaration et autorisation.